Intelligence émotionnelle : le QE, ça n’existe pas…

Bien qu’il existe de nombreux modèles d’intelligence émotionnelle, ils sont souvent regroupés sous le nom de Quotient Émotionnel, dans le langage populaire.

Sachant qu’il n’existe pas de test validé scientifiquement pour mesurer son quotient émotionnel.

Un terme alternatif est Intelligence Émotionnelle, qui comprend quatre domaines :

  • la conscience de soi,
  • la gestion autonome de soi,
  • la conscience sociale
  • et la gestion des relations sociales. 

Dans ces domaines, il y a plusieurs compétences de l’Intelligence Émotionnelle, à commencer par la conscience de soi émotionnelle dans le domaine de la conscience de soi.

La maîtrise de soi émotionnelle, l’adaptabilité, l’orientation vers la réussite et une attitude positive relèvent de l’autogestion.

L’empathie et la conscience organisationnelle constituent la conscience sociale.

La gestion des relations comprend l’influence, l’encadrement et le mentorat, la gestion des conflits, le travail d’équipe et le leadership inspirant. 

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Qu’est-ce que l’intelligence ? 

Selon Jean Piaget, l’intelligence est un processus complexe et actif de construction de la connaissance qui émerge chez les enfants à travers leur interaction avec l’environnement.

Pour lui, l’intelligence ne se limite pas à une capacité innée, mais est plutôt le résultat d’une série de stades de développement cognitif.

Piaget a proposé une théorie du développement cognitif qui soutient que les enfants passent par différents stades de développement, chacun caractérisé par des modes spécifiques de pensée et de compréhension du monde.

Au fur et à mesure que l’enfant grandit et interagit avec son environnement physique et social, il construit activement sa propre compréhension et son savoir.

Les différents stades selon Piaget

Le premier stade est le stade sensorimoteur, qui va de la naissance à environ 2 ans. Durant cette période, les enfants explorent le monde à travers leurs sens et leurs actions physiques. Ils acquièrent progressivement la capacité de coordonner leurs mouvements et leurs perceptions, et de développer des représentations mentales basées sur leurs expériences sensorielles.

Ensuite, vient le stade préopératoire, qui s’étend de 2 à 7 ans. Durant cette période, les enfants commencent à utiliser des symboles, tels que des mots et des images, pour représenter des objets et des événements. Ils développent également une capacité de jeu symbolique et peuvent commencer à penser de manière plus abstraite, bien que leur pensée soit encore limitée par l’égocentrisme et le manque de conservation des quantités.

Le stade opératoire concret suit, de 7 à 11 ans, où les enfants deviennent capables de pensée logique et de raisonnement concret. Ils peuvent résoudre des problèmes en utilisant des opérations mentales concrètes, mais leur pensée reste liée à des situations concrètes et à des objets tangibles.

Enfin, le stade opératoire formel se développe à partir de l’adolescence et au-delà. À ce stade, les adolescents acquièrent la capacité de pensée abstraite, hypothétique et déductive. Ils peuvent réfléchir à des concepts abstraits, à des situations hypothétiques et à des problèmes complexes, sans être limités par les contraintes de la réalité immédiate.

Processus actif d’adaptation et de construction de la connaissance

Dans l’ensemble, pour Piaget, l’intelligence est le résultat d’un processus actif d’adaptation et de construction de la connaissance qui se produit par le biais de l’interaction de l’enfant avec son environnement. Au fur et à mesure que les enfants grandissent et développent leur intelligence, ils construisent des schémas de pensée plus avancés et sont capables de résoudre des problèmes de manière de plus en plus complexe et créative.

La recherche a permis d’apporter d’autres nuances à la définition de l’intelligence.

Par exemple, Cattell et Horn distinguent deux types d’intelligence: l’intelligence fluide est la capacité à résoudre des problèmes nouveaux et complexes et l’intelligence cristallisée représente les connaissances et compétences acquises au fil du temps.

De son côté, Robert Sternberg a décrit trois composantes de l’intelligence : l’intelligence analytique (résolution de problèmes), l’intelligence créative (génération de nouvelles idées) et l’intelligence pratique (adaptation à des situations réelles).

Et les émotions dans tout ça ?

William James était un psychologue et philosophe américain connu pour ses contributions à la psychologie des émotions. Selon James, les émotions sont des expériences subjectives qui résultent de la perception des changements physiologiques dans le corps en réponse à des stimuli externes.

Pour James, les émotions ne sont pas seulement des réactions mentales, mais aussi des réactions corporelles qui se produisent en réponse à des événements ou des situations spécifiques. Il soutenait que les émotions sont directement influencées par les réactions physiologiques, telles que les changements dans le rythme cardiaque, la respiration, les tensions musculaires, etc.

Selon James, les émotions ne sont pas causées par des événements externes, mais plutôt par la perception des changements physiologiques qui se produisent dans le corps en réponse à ces événements.

Il a proposé la théorie de la réaction émotionnelle, selon laquelle les émotions surviennent lorsque nous ressentons les manifestations physiologiques d’une situation donnée.

Par exemple, pour lui, nous ne pleurons pas parce que nous sommes tristes, mais nous sommes tristes parce que nous pleurons. Il soutenait que les émotions sont des expériences subjectives qui sont ressenties après que notre corps ait réagi aux stimuli.

Cette perspective de James a été influente dans la compréhension des émotions et a ouvert la voie à de nombreuses recherches ultérieures sur la physiologie et la psychologie des émotions.

Sa théorie met l’accent sur le lien entre les réactions physiologiques et les expériences émotionnelles, et suggère que nos émotions sont intimement liées à nos sensations corporelles.

Le HPE (haut potentiel émotionnel) et le Quotient émotionnel, deux concepts à la mode ?

Le quotient émotionnel (QE) est une mesure utilisée pour évaluer les compétences émotionnelles et sociales d’une personne. Bien que le terme QE ait gagné en popularité et soit largement utilisé, il est aussi critiqué pour plusieurs raisons :

Il n’existe pas de consensus clair ni sur la définition, ni sur la mesure du QE, dans la communauté scientifique. Différents modèles et tests de QE existent, ce qui peut conduire à des résultats variables et à une interprétation subjective. Certains chercheurs remettent en question la validité scientifique du QE.

En effet, sa mesure est souvent basée sur des auto-déclarations plutôt que sur des mesures objectives que l’on retrouve dans les tests standardisés validés scientifiquement. 

En effet, les mesures du QE sont souvent basées sur des questionnaires auto-administrés, ce qui peut être sujet à des biais de perception et à une surestimation ou une sous estimation des compétences émotionnelles, variable en fonction du moment.

De plus, les mesures du QE se concentrent principalement sur la conscience et la gestion de ses propres émotions, mais peuvent ne pas capturer pleinement d’autres aspects importants de l’intelligence émotionnelle, tels que l’empathie ou la compréhension des émotions des autres.

Une autre critique vient du fait que le QE réduit la complexité des émotions et des compétences émotionnelles à une seule mesure quantifiable. Les émotions sont un phénomène multidimensionnel et complexe, et le réduire à un chiffre unique peut omettre des aspects importants de l’expérience émotionnelle et des compétences sociales.

Le QE est souvent présenté comme un prédicteur de succès dans différents domaines de la vie.

Cependant, les preuves scientifiques soutenant cette relation causale sont limitées et controversées.

Il est difficile d’établir une relation directe de cause à effet entre le QE et les résultats mesurables, tels que la performance académique ou professionnelle.

D’autres facteurs entrent en jeu dans la réussite tels que l’estime de soi ou le sentiment d’efficacité personnelle ou encore l’attachement.

Les mesures du QE sont souvent basées sur des concepts et des compétences émotionnelles qui sont influencés par des normes culturelles spécifiques.

Les modèles occidentaux de QE peuvent ne pas être universellement applicables et peuvent ne pas tenir compte des différences culturelles dans l’expression et la compréhension des émotions.

L’intelligence émotionnelle selon Salovey et Mayer

D’un autre côté, l’intelligence émotionnelle selon, Salovey et Mayer, est la capacité à percevoir, comprendre, gérer et utiliser les émotions de manière efficace, à la fois chez soi et chez les autres.

Leur travail a jeté les bases de la compréhension de l’intelligence émotionnelle et de son rôle dans le comportement humain.

Les modèles proposés par les auteurs reposent sur quatre branches principales de compétences émotionnelles :

  • Percevoir les émotions : reconnaître les émotions chez soi et chez les autres, ainsi que percevoir les signaux émotionnels non verbaux.
  • Faciliter les émotions : générer des émotions appropriées pour faciliter la pensée et la résolution de problèmes.
  • Comprendre les émotions : comprendre les nuances émotionnelles, les relations entre les émotions et les schémas émotionnels plus complexes.
  • Gérer les émotions : réguler et gérer ses propres émotions ainsi que celles des autres, en développant des stratégies pour faire face aux émotions négatives et promouvoir des émotions positives.

Ces auteurs ont contribué de manière significative à la reconnaissance et à la compréhension de l’intelligence émotionnelle en tant que concept distinct de l’intelligence cognitive traditionnelle.

Daniel Goleman

Un autre auteur, Daniel Goleman, psychologue américain, est connu pour avoir popularisé ce concept d’intelligence émotionnelle (IE).

Selon Goleman, l’intelligence émotionnelle désigne la capacité d’une personne à reconnaître, comprendre et gérer ses propres émotions, ainsi que celles des autres.

Goleman soutient que l’intelligence émotionnelle est essentielle pour réussir dans la vie, que ce soit sur le plan personnel, professionnel ou social, sans être le seul facteur.

Il affirme que ces compétences émotionnelles sont plus importantes que le quotient intellectuel (QI) traditionnel pour prédire la réussite et le bien-être à long terme.

En résumé, selon Daniel Goleman, l’intelligence émotionnelle englobe la conscience de soi, la maîtrise de soi, la motivation, l’empathie et les compétences sociales.

C’est la capacité de reconnaître, comprendre et gérer ses propres émotions, ainsi que celles des autres, afin de favoriser des relations positives, de prendre des décisions éclairées et de s’épanouir dans différents aspects de la vie.

Quelques articles pour aller plus loin

Gerald Matthews, Moshe Zeidner et Richard D. Roberts « Emotional Intelligence: New Ability or Eclectic Traits? » (2007) 

Goleman, D. (1997). L’intelligence émotionnelle, Paris, Robert Laffont.

Salovey, P., & Mayer, J. D. (1990). « Emotional intelligence. » Imagination, Cognition and Personality, 9(3), 185-211.

James, W. (1984). What is an emotion ? Mind, 19, 188-205

Piaget, J. (1977). La naissance de l’intelligence chez l’enfant, Neuchâtel, Delachaux et Niestlé.

John D. Mayer, David R. Caruso et Peter Salovey « Can Emotional Intelligence Be Schooled? A Critical Review » (2005) 

Mayer, J. D., Salovey, P., & Caruso, D. R. (2000). « Models of Emotional Intelligence. » In R. J. Sternberg (Ed.), Handbook of intelligence (pp. 396-420). Cambridge University Press.

K. V. Petrides, Anna Furnham « Emotional Intelligence Predicts Life Skills, but Not as Well as Personality and Cognitive Abilities » (2009)  

Salovey, P., & Mayer, J. D. (2005). « Emotional intelligence. » In K. R. Scherer, A. Schorr, & T. Johnstone (Eds.), Appraisal processes in emotion: Theory, methods, research (pp. 267-285). Oxford University Press.